J'suis arrivée à Zipolite aussi vidée physiquement qu'émotionnellement. Je venais de faire sept heures de bus de nuit, sans trop dormir, mais surtout, j'avais fait mes au revoir à David la veille au soir.
Ça faisait plus d'un mois qu'on avait pris la décision de se séparer. Ça s'était fait sans drama, sans fracas, juste deux adultes qui sont honnêtes avec eux-mêmes et qui croient tous les deux que c'est pour le mieux. Ce n'est pas faute d'avoir essayé - on s'est donné le temps et on a sincèrement mis les efforts, c'est juste que la relation s'était mise à manquer de fluidité et ne correspondait plus à l'idée qu'on se faisait de la vie, du voyage et du couple. C'est donc avec beaucoup de tristesse, mais surtout avec une grande lucidité qu'on avait planifié notre séparation. Les semaines qui ont suivies se sont déroulées quasi normalement, avec toujours autant d'affection, de tendresse et, surtout, un grand respect. N'empêche, le dernier jour qu'on a passé ensemble, j'avais le cœur en miettes et la peur au ventre. Quand David est parti de la chambre d'hôtel et que j'ai enfilé mes sacs à dos, je me suis regardée dans le miroir et je me suis dit que c'était tout ce que j'avais, que c'était tout ce que j'étais. Je me suis rarement sentie aussi seule et aussi petite dans le monde. Mais rassurez-vous, nous étions bien entourés les jours qui ont suivis. Un ami de Québec est venu rejoindre David à Oaxaca et ils passeront un bon mois ensemble à continuer d'explorer le Mexique. Pour ma part, je suis allée rejoindre ma marraine et mon oncle, qui avaient préféré prendre l'avion que de se taper le bus de nuit (je les comprends!) pour se rendre à Zipolite. Et je vous le confirme, y'a pas meilleur endroit pour se guérir d'une peine d'amour! Zipolite est un tout petit village sur la côte sud-ouest du Mexique. À ce temps-ci de l'année, il y fait toujours beau et chaud. La vue qu'on avait à partir de l'hôtel est à couper le souffle et les installations, autant de l'hôtel que des environs, invitent au ressourcement. Il règne dans le village une atmosphère plutôt bohème et les gens qui visitent l'endroit sont reconnus pour leur grande ouverture et convivialité. Sa plage est d'ailleurs prisée par les nudistes et plusieurs hôtels du coin offrent le port optionnel des vêtements. C'était le cas de notre hôtel. J'ai passé les premiers jours habillée, à pleurer à intervalles irréguliers et à me reposer. Puis, à force de couchers de soleil, de jogging sur la plage et de baignades dans la mer, j'ai fini par laisser tomber quelques morceaux et par retrouver une certaine sérénité. Le temps, la beauté des environs, la présence de ma famille et mes moments d'introspection en solitaire ont peu à peu apaisé ma peine et tout le flot d'émotions et de pensées qui se bousculaient dans ma tête et dans mon cœur. Est-ce que le deuil est déjà fait? Bien sûr que non. J'aurai encore besoin de temps pour m'habituer à l'absence de David et surtout, pour me retrouver moi, celle que je suis au plus profond et que j'ai peut-être un peu perdue en cours de route. Mais je me console et je suis fière même, de la façon dont on a géré cette décision difficile. Mon plus grand soulagement est de n'avoir aucun regret, pas de "et si" ou de "ouin, mais". Juste la certitude qu'on était rendus là et qu'on a fait ce qu'il fallait. Après une semaine de recueillement, j'étais prête à reprendre la route, seule, cette fois-ci. Hier soir, quand le taxi est arrivé pour me prendre à l'hôtel, ma gang de tout nus m'ont chaleureusement salué et j'ai serré ma tante et mon oncle très fort avant de partir. Dans le taxi, la fenêtre ouverte, j'ai fermé les yeux en souriant. J'ai senti le nouveau vent de liberté qui m'accueillait. J'ai su que tout irait bien.
3 Commentaires
Jules
8/2/2017 09:05:40
Ah le soleil! Fameux pour faire sécher les larmes. Mais je reconnais surtout ta grande maturité dans ce texte. Bon vent chère Gabrielle!
Répondre
Michele Paris
8/2/2017 13:36:45
Avoir si peu mais posséder tant!
Répondre
Laisser un réponse. |
Récits
Tout
Archives
Septembre 2020
|