Alors que s'enfilent les au revoir, au travers des dernières accolades, je reçois toutes sortes de recommandations de la part de collègues, amis et membres de ma famille.
Pendant que certains s'inquiètent pour ma survie en général, s'assurant que je maîtrise les arts martiaux et que je traîne du poivre de cayenne en tout temps, d'autres, à l'inverse, me suggèrent plutôt le dumpster diving et de faire du pouce pour économiser comme une vraie hippie un peu gratteuse. Derrière chaque conseil, se cache un extrait de la personne qui me le donne, révélant ses propres craintes, valeurs, envies et préoccupations de la vie. Il y a l'anxieux, qui vient les yeux tout ronds quand je lui explique qu'on n'a pas d'itinéraire fixe ni de date de retour. Il me conseille habituellement d'être prudente et alerte et surtout, de donner des nouvelles le plus souvent possible. L'envieux, qui a l'air rêveur quand je lui parle du voyage, parce qu'il se projette lui-même dans cet univers. Il me regarde souvent droit dans les yeux en me faisant promettre d'en profiter au maximum. Le sédentaire, qui ne comprend pas pourquoi je vais me compliquer la vie à vivre dans l'inconfort des déplacements constants. Il ne me conseille rien, mais il prend soin de me rappeler que mon lit va me manquer. Le nomade, qui sait exactement de quoi je parle quand je lui dis que l'envie de partir m'habite depuis que je suis revenue d'un long voyage. Il sautille généralement d'excitation à l'idée de repartir lui-même et il a plein d'endroits et de contacts à me référer. Le pessimiste, qui pense que le monde est mauvais et que je magasine les ennuis. Il me rapporte des articles de journaux sur les derniers attentats et me fait jurer de ne pas aller dans les pays dangereux. L'optimiste, qui pense que le monde est bon et que je vais vivre toutes sortes de belles expériences et avoir tout plein d'opportunités. Il me parle parfois des enfants que je vais accoucher à l'autre bout du monde et du pays de rêve qui me fera déménager pour de bon. L'expérimenté, qui a lui-même parcouru plusieurs continents, qui en a vu de toutes sortes et qui a un dictionnaire multilingue comme lecture de chevet. Il me montre généralement toutes sortes d'applications à télécharger pour me rendre la vie plus facile et il en profite pour me raconter l'une de ses aventures les plus rocambolesques. Le fonctionnel, qui réfléchit à la façon la plus efficace de voyager et qui voit cette aventure comme une suite de petits défis techniques. Il me partage habituellement ses trucs pour sauver de l'espace dans mon sac à dos et il me fait part de sa méthode infaillible pour ranger une tente en deux temps trois mouvements. Le désintéressé, qui est bien chez lui et qui n'en a rien à foutre de ce qui existe ailleurs. Il ne me recommande rien parce qu'il ne comprend pas comment ça peut être possible de partir comme ça et il pense encore que je vais rentrer au bureau lundi matin. Le curieux, qui n'a pas le courage de partir, mais qui se meure de connaître ce qui est loin et différent de chez lui. Il a souvent bien peu de conseils, mais plutôt une tonne de questions sur le monde et les voyages en général. L'analytique, qui voit le voyage comme une suite de procédures à remplir et de démarches à faire avant de vraiment en profiter. Il vérifie généralement si j'ai tous mes visas, si j'ai pensé aux impôts de l'an prochain et si j'ai obtenu mon permis de conduire international et mon passeport à jour. Le paternel (qui n'est pas forcément l'un de mes parents), qui est fier de me voir partir mais qui a mille et un conseils à me donner. Il s'assure habituellement que je mettrai de la crème solaire, que j'ai eu tous mes vaccins et que mon courrier a été redirigé. Et finalement, celui qui regrette de ne jamais être parti et qui pense qu'il n'en aura plus la chance. Il approuve mon sens de l'aventure et me rappelle de ne pas avoir d'enfants/maison/dettes tant que je n'ai pas vécu tout ce que j'avais à vivre. Vous l'aurez bien compris, ces descriptions sont caricaturées pour faire rire. La plupart des gens sont un heureux mélange de toutes ces personnalités et c'est ce qui en fait la beauté. Et même si tous les conseils que j'ai énumérés m'ont été donnés pour de vrai, je sais très bien qu'ils sont la preuve de tout l'amour et toute la considération que mes proches ont pour moi. Merci gang de vous soucier de moi, ça fait chaud au cœur!
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Septembre 2020
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